On sait extrêmement peu de choses sur l’auteur du conte du Graal. En réalité, tout ce que l’on sait a été déduit des propos que l’auteur lui-même tient dans ses prologues, ainsi que des traces de ses connaissances littéraires qui apparaissent ici et là dans ses commentaires en cours de récit (pour la plupart, des allusions à Ovides).
La question que tout le monde se pose est celle des sources. Chrétien, comme le veut la tradition du moyen-âge, n’invente rien (le consensus universitaire veut qu’à cette époque l’invention soit réservée à Dieu seul). Il ne fait qu’enjoliver un récit existant qu’il mentionne dans ses prologues. Et chacun de chercher le récit de départ, croyant qu’il pourra ainsi connaître la signification réelle de ces contes mystérieux.
Cependant, nombreux sont ceux qui comme R. DRAGONETTI [1] pensent que ces prologues ne sont pas à prendre au premier degré. Une partie de sa démonstration tourne autour du fait que la part d’imagination de Chrétien dans le récit du Graal est prépondérante. Chrétien cependant utilise un ensemble d’artifices pour donner à son oeuvre un aspect conforme aux règles de l’époque (i.e. les règles de l’église catholique). La phrase clef de l’oeuvre de Chrétien pour Dragonnetti est tirée d’YVAIN :
Et met, s’il puet, le san a oevre
(le sage dissimule sa folle pensée et met s’il le peut son savoir en oeuvre)
Nous adhérons en bonne partie à cette thèse (sauf sur la nature de cette folle pensée) et le prologue du conte du Graal fera l’objet d’un article particulier.
Mais la véritable question en ce qui concerne Chrétien de Troyes est pour nous la suivante (toujours la même d’ailleurs que dans l’article précédent sur Chrétien ) : les différents symboles du récits et les informations "initiatiques" que l’on y trouve sont-elles voulues par l’auteur où sont-elles le fruit du hasard, disons plutôt d’une inspiration particulièrement heureuse mais inconsciente [2] ?
Un certain nombre d’indices, que nous allons passer en revue, nous incitent à penser que Chrétien était un initié. Reste à déterminer à quelle fraternité il appartenait [3].
Un drôle de Chrétien
Compte tenu de la nature des prologues, beaucoup ont pensé que le nom de Chrétien de Troyes n’était qu’un pseudonyme (une idée que j’aime beaucoup, est que le nom de Chrétien de Troyes pourrait même désigner un collectif). Il est sûr en tout cas que l’auteur n’use pas de son nom au hasard. S’il semble que le nom de Chrétien fut surtout donné comme nom de baptême à des juifs convertis, ce n’est vraissemblablement pas le cas de notre auteur. Il parle des juifs dans ses romans comme le ferait n’importe quel clerc de son époque ("Les Juifs, rendus cruels par leur jalousie - on devrait les abattre comme des chiens - firent leur propre malheur (...) [4] et la grande place qu’occupe la femme dans ses textes ne cadre pas avec une éducation juive.
Mais le plus important est que lorsqu’il mentionne son nom, il rattache ainsi sciemment son propos au christianisme. Cependant, il s’agit d’un christianisme bien particulier, assez éloigné du credo catholique [5]. Nous voilà donc avec quelqu’un qui se désigne sous le terme de Chrétien, qui aime une "Sainte Eglise" , qui cite Paul, Jean et ne cesse de rappeler les valeurs du sermon sur la montagne. On croirait un parfait Cathare.
La ville de Troyes
En ce qui concerne la ville de Chrétien, il est très vraisemblable que ce soit bel et bien Troyes. Même si la correspondance Troyes - Troie amène des connotations intéressantes (ne serait-ce que sur l’aspect païen), il est à noter que Chrétien n’use jamais de cette origine dans ses prologues (il ne se désigne comme Chrétien de Troyes que dans un seul roman).
Troyes à cette époque est tout à fait la ville où un personnage tel que Chrétien aurait pu résider, véritable carrefour culturel où se retrouvent les influences de l’orient, du midi, de l’Allemagne et surtout de l’Angleterre.
Le dernier point en faveur de Troyes est bien sûr les dédicaces des romans. Même si ces dédicaces ont un sens caché et que les noms de Philippe de Flandre et Marie de Champagne désignent un aspect de l’âme humaine et non un personnage historique, l’auteur a néanmoins choisi des personnages plausibles de son entourage, c’est à dire de la cour de champagne (Philippe de Flandre a été pendant une période un familier de la cour de champagne lorsqu’il était prétendant de Marie).
Quelques traits caractéristiques
On retrouve à travers tous les romans de Chrétien de Troyes un certain nombre de spécificités qui ont contribué à distinguer les mouvements initiatiques gnostiques des autres sectes ou églises :
L’influence civilisatrice : Les histoires de Chrétien ont toujours un fond civilisateur qui s’exerce sur un monde encore barbare et parfois même sauvage. Les chevaliers de Chrétien luttent fréquemment contre des monstres (serpents, nains, géants...) ou des enchantements. Dans les différentes continuations, cet aspect civilisateur est soit abandonné au profit d’histoires de vengeance soit dénaturé et transformé en évangélisation (pour les continuations Bénédictines et cisterciennes). Mais cette influence civilisatrice est aussi celle de Chrétien lui-même, son oeuvre ayant eu un fort impact sur le plan culturel, surtout si on prend en compte toutes les imitations et continuations qu’il a généré avec le conte du Graal [6]. Cette influence civilisatrice caractérise des fraternités telles que les Cathares ou les Manichéens.
Le rôle des femmes : "Le romancier recrée la femme, à la fois conscience, guide et souveraine du chevalier" remarque D. POIRION. Tout le monde a constaté l’importance des femmes dans l’univers de Chrétien de Troyes, et dans l’univers Graalien en général, que ce soit en tant qu’instigatrices ( Aliénor d’Aquitaine, Marie de Champagne ) ou dans les romans eux-mêmes. Bien sûr, la présence féminine dans les récits de Chrétien peut s’expliquer par la symbolique et constitue une partie des données ésotériques fournies par chrétien. Il n’en demeure pas moins que le rôle de la femme est très important et que les rapports entre les forces positives - masculines et négatives - féminines dans le candidat sont aussi l’occasion pour l’auteur d’aborder les rapports homme - femme dans la société des preux de la table ronde. Cette présence des femmes dans une communauté initiatique et leur rôle, aussi important que celui des hommes ( Guenièvre, Enide qui accompagne Erec dans ses tribulations, l’orgueilleuse de Nogres initiatrice de Gauvain...) est aussi un aspect caractéristique des Cathares et des Manichéens au contraire des autres religions [7].
Le rapport à la violence : les chevaliers évoluent dans un univers violent. Néanmoins, il y a une très grande différence dans le traitement de la violence entre Chrétien et ses continuateurs (voire à ce sujet l’article la mystérieuse vertu de Galaad ). Le conte du Graal est particulièrement significatif puisque les héros ne tuent plus. Cette non-violence est aussi un trait qui distingue les gnostiques véritables (une fois encore, cathares et manichéens sont bien connus pour leur non violence absolue) des mystiques (il suffit de penser à Augustin ou Bernard de Clervaux tous deux promoteurs de la violence au service de l’église) et des occultistes.
Les autres romans
Si Chrétien de Troyes était un initié, cela devrait transparaître aussi dans ses autres romans, et non pas seulement dans le conte du Graal.
Et c’est bien le cas en effet. Contrairement à ce que j’appellerai des transcripteurs éclairés qui, comme Blavatsky, ont publié aussi bien des perles de sagesse comme le petit livre "la voix du silence" que des ouvrages qui se rapprochent plus de "mon curé chez les tibétains", Chrétien est assez égal dans sa thématique. On retrouve dès son premier roman les axes forts de l’initiation gnostique :
la renaissance de l’âme (Erec rencontre Enide),
le nouveau vêtement (Enide reçoit une nouvelle robe somptueuse des mains de la reine),
les combats intérieurs,
la mort du moi (mort apparente d’Erec),
l’homme - microcosme (la joie de la cour),
la défaite de l’être aural (la joie de la cour),
le vêtement de lumière de l’homme nouveau (Erec couronné par Arthur reçoit la robe tissée par les fées [8]et le sceptre de la vie)
Avec déjà un ensemble d’images et de techniques que l’on retrouvera dans les romans suivants : Le prologue à double sens, le chevalier rouge, la princesse la plus belle du monde, la rencontre avec Gauvain, la symbolique du vêtement...
Mais Chrétien, enflammé par sa découverte intérieure, et même s’il est fier de son premier ouvrage (la fameuse "moult belle conjointure") ne s’en tient pas là. Il remet sans cesse son ouvrage sur le métier, approfondissant de plus en plus d’aspects, se rapprochant de plus en plus du candidat. Ainsi, dans Erec et Cligès, il invite à la quête, décrit le processus général de renaissance de l’âme, de la régénération du microcosme et du retour à la royauté. On retrouve d’ailleurs certaines analogies entre ces deux premiers romans et les aventures de la Pistis Sophia dans l’évangile de Valentin. Mais au fur et à mesure, il rentre dans les processus psychiques de la quête intérieure, la lutte contre les ténèbres, la folie d’Yvain.
Les critiques n’ont pas étés insensibles à cet infléchissement des romans de Chrétien. Si Erec et Cligès peuvent raconter une histoire compréhensible même pour ceux qui ne comprennent pas les images alchimiques (voir http://graal-initiation.blogspot.com/2006/04/encore-lalchimie.html), ce n’est plus le cas des romans suivants comme le note D. POIRION dans son introduction à l’ oeuvre complète de Chrétien de Troyes (la pléiade) :
"Dans le diptyque composé d’Yvain et de Lancelot s’élabore ce que l’on peut appeler une esthétique du symbole, faisant appel à l’image pour condenser le sens. La lecture héroïque se double d’une lecture herméneutique déchiffrant le réseau des images. (...) Le texte poétique tissant en filigrane un réseau de motifs imagés, comme un "intertexte", est bien là pour nous dire autre chose que ce qu’il raconte."
On retrouve dans le triptyque Yvain, Lancelot, Perceval la même thématique du héros fondateur, de la descente au enfers [9] et de l’amour héroïque. [10]
Mais on peut voir à travers le Roman de Lancelot un véritable brouillon du Perceval (a priori, Chrétien a d’ailleurs abandonné l’écriture du Lancelot en cours de route comme en témoigne la fin du texte : "Le clerc Godefroi de Lagny a achevé la Charrette. Mais que personne ne lui reproche d’avoir continué le travail de chrétien..." [11]) : on y trouve déjà ce rôle de remplaçant du héros principal avec Gauvain, le gué périlleux et les aventures dans "l’autre monde".
Cette volonté de Chrétien de faire passer une révélation particulière dans ses romans est très sensible dans ses prologues.
Dans Erec, le prologue fait allusion à la parabole des talents : le sage se doit d’enseigner.
Dans Yvain : le sage dissimule sa folle pensée et met s’il le peut son savoir en oeuvre.
Chrétien annonce que son récit a un sens caché. Il indique également qu’il détient des connaissances supérieures et qu’il se doit de les communiquer [12].
Dans le conte du Graal, Chrétien est beaucoup plus affirmatif : il est conscient d’avoir atteint son but : il ne cherche plus à transmettre un savoir : il a semé en si bon lieu qu’il est sûr de récolter au centuple.
L’herméneutique
Chrétien, par son art poétique, attire dès le début l’attention du lecteur sur mille petits détails permettant une lecture du texte à un autre niveau : en reliant entre elles des images qui doivent être interprétées. Ainsi, dans le conte du Graal, la couleur rouge est évidemment un signe reliant certains épisodes rattachés au thème de la lumière pour leur donner un sens particulier.
Mais le poète n’utilise pas seulement l’art du langage, il emploie un certain nombre d’images codées - exactement comme dans les rébus - propres à l’alchimie [13]. Un certain nombre de ces images seront abordées dans d’autres articles.
Un autre procédé alchimique appliqué par Chrétien est le découpage du texte en tableaux la symbolique des personnages pouvant changer d’une scène à l’autre. Entre chaque scène, une "glue romanesque" permet de maintenir le fil de l’histoire [14]. L’exemple le plus frappant est celui de la mère de Perceval :
Aux premières lignes du roman, Perceval est appelé fils de la veuve dame, ce qui renvoie à une symbolique particulière.
Perceval est ensuite enseigné par sa mère puis la quitte. Cette mère n’est plus la "veuve dame" que désigne l’expression "fils de la veuve"
Perceval finit par quitter le château de Blanchefleur parce qu’il veut revoir sa mère. A nouveau, il ne s’agit plus de la mère qui lui a donné les conseils, mais plutôt de celle qui est désignée dans l’expression "fils de la veuve".
Après l’épisode au château du Graal, on explique à Perceval qu’il a échoué à cause de son péché : celui d’avoir fait mourir sa mère. Nouvelle signification de la mère, qui n’est ni "la veuve dame", ni celle qui donna les conseils.
La connaissance de cette technique et l’identification des différents tableaux permet également de se débarrasser de la glue romanesque, qui ne sert qu’à lier les épisodes entre eux et à relancer l’action. Ainsi, on lit que Perceval quitte Blanchefleur, mais il est évident que le candidat qui a délivré la fleur blanche en lui ne la quitte pas. Wolfram, plus prolixe que Chrétien, prend bien soin d’expliciter ce lien en mariant Condwiramour et Parzival et il ne manque pas de préciser que c’est seulement en pensant à sa femme que Parzival reçoit la force qui lui permet de triompher.
La fraternité du Graal
Chrétien de Troyes était-il membre d’un mouvement initiatique particulier ? Si on admet l’hypothèse soutenue par cette article, selon laquelle Chrétien écrivait sciemment un manuel d’initiation, alors nous devons répondre par l’affirmative. Cependant, identifier cette communauté est très difficile compte tenu du peu d’éléments dont nous disposons.
La seule fraternité gnostique identifiée de cette époque est celle des Cathares. Le nom utilisé par l’auteur : Chrétien, ses allusions à une Eglise, ses citations de la bibles et les valeurs auxquelles il se rattache font effectivement penser au catharisme [15]. Et si l’on associe généralement le catharisme au sud de la France, il ne faut pas oublier que les premiers parfaits cathares ont étés identifiés à Cologne un demi siècle avant que le catharisme occitan ne connaisse son apogée. Le catharisme était un mouvement européen très étendu, même s’il n’a éclaté au plein jours, avec l’influence civilisatrice que l’on connaît, que dans une région plus restreinte. On sait notamment qu’il y avait des cathares en Flandres et en Champagne et que Philippe de Flandres en a brûlé quelques-uns. Dans ce contexte, l’hypothèse avancée dans certaines études [16] comme quoi "il n’est pas impossible que Chrétien fût pénitent lui-même et qu’il présentât le grand ouvrage qu’était Perceval pour réparer une faute, tel son héros, Yvain qui recherchait le pardon de son péché" prend un sens particulier : Ce pourrait-il que Chrétien eût à sauver sa vie en abjurant le catharisme (les Cathares se sont distingués par le fait qu’ils n’abjuraient pas, quelles que soient les tortures que celà entrainerait, à la différence de bien d’autres mouvements gnostiques qui les ont précédé - et qu’Augustin fustige - qui abjuraient devant leurs bourreaux et qui reprenaient ensuite leurs anciennes pratiques) et qu’il fût mortifié par sa faiblesse ? [17]
Cependant, aucun des textes cathares qui nous sont parvenus n’utilise le cryptage Alchimique. L’enseignement y est soit explicite, soit - pour les connaissances ésotériques - donné sous forme de petites fables (A pondérer par le fait que ces textes ne sont que ceux du Catharisme occitan cités par l’inquisition, donc presque rien).
On peut aussi imaginer Chrétien à la manière d’un Jacob boehme, ayant percé seul puis enseignant sur la base de sa révélation. Mais de tels maîtres insistent rarement sur la nécessité d’une Ecole initiatique, d’une communauté initiatique - là où l’on fait les chevaliers - même s’ils mentionnent la "Fraternité" des libérés.
Mais nous ne connaissons finalement pas grand chose de la méthode pratique d’initiation au moyen-âge. "Ceux de la table ronde", comme les appelle Chrétien, pouvaient fort bien se retrouver hors du plan matériel dans la demeure sancti spiritus décrite dans les textes de la Rose-Croix. Les alchimistes par exemple, sont généralement considérés comme des solitaires alors qu’ils mentionnent aux aussi cette communauté [18].
[1] la vie de la lettre au moyen-âge, le conte du Graal - ed. du seuil 1980
[2] on peut prendre le cas, dans un passé beaucoup plus récent, de l’Evangile du verseau. Force est de constater l’énorme décalage entre le texte lui-même et les propos (lire ’les élucubrations’) de son auteur/transcripteur
[3] En effet, nous avons vu dans les articles précédents : Perceval et la vision intérieure et la racine et le surgeon que l’initiation spirituelle ne va pas sans une communauté. Même G. Meyrink, qui a percé en suivant la voie occulte et qui dépeint toujours un processus solitaire, mentionne la liaison avec la fraternité comme point culminant : la "fraternité des jardiniers" dans l’ange à la fenêtre d’occident (avec la notion de service à l’humanité), "l’Ordre" dans le dominicain blanc
[4] le conte du Graal v6292 et suiv.
[5] Il est important de rappeler que les passages typiques du dogme catholique tels que l’adoration des reliques, les fragments de la vraie croix... notamment dans Erec et Enide sont des rajouts du copiste guyot - voir à ce propos la notice de l’édition de la pléiade
[6] voir "The legacy of Chrétien de Troyes", ed. by Norris, J. Lacy, D. Keyllyand & K. Busby - 1987-1988 en 2 volumes
[7] on retrouve les femmes, pour des raisons pratiques, dans les mouvement occultes tantriques, mais ceux-ci ne satisfont ni au critère civilisateur ni au critère non-violent
[8] Chrétien aurait tiré la description de cette robe de l’ouvrage latin d’un contemporain de Macrobe intitulé "des noces de philosophie et de mercure". Amis alchimistes bonjour.
[9] pour Jean Charles Païens ("actualité de l’initiation" in les romans de la table ronde, la normandie et au-delà...) la première des initiations est qu’il faut faire l’expérience du mal pour triompher et pour s’affirmer
[10] "Il n y a pas de doute que Chrétien de Troyes se préparait à écrire une oeuvre spirituelle lorsqu’il travaillait sur le Chevalier au lion. Ayant traité plusieurs fois de 1’amour entre deux êtres humains qui reflétait l’amour divin, Chrétien se dirigeait à la fin de sa carrière vers la recherche même du divin" J. Bednar in La spiritualité et le symbolisme dans les oeuvres de Chrétien de Troyes, Paris, Nizet, 1974, p.129
[11] Un petit indice qui fait pencher la balance du côté d’un groupe travaillant sous le nom - ou autour de - Chrétien de Troyes
[12] tout comme jacob Boehme qui dira : "Je voudrais bien aussi me reposer dans ma douce quiétude si je n’étais pas obligé de faire cette oeuvre. Mais le Dieu qui a fait le monde est beaucoup trop puissant pour moi : il peut m’établir dans ce qu’il jugera bon" ou encore "Cependant je n’arrivais à rien comprendre jusqu’au moment où le Très-Haut me vint en aide avec son souffle, me réveillant à une vie nouvelle. Depuis ce temps là, j’ai amélioré mon style, j’ai acquis une connaissance plus profonde, plus solide."
[13] par exemple, le Roman d’Erec et Enide commence par la chasse au cerf blanc. Quand on ne connaît rien à l’alchimie, on dit (comme 90% des études universitaires l’on fait) : "Avec la coutume de la chasse au cerf blanc, nous entrons dans le domaine du merveilleux celtique"
QU’est ce que ça nous apporte ? rien.
Alors que pour celui qui connaît un tant soit peut la symbolique alchimique, le cerf blanc désigne le premier mercure de l’oeuvre au blanc (appelé le fugitif : cervus fugitivus étant probablement un jeu de mot sur servus fugitivus). Ainsi, l’auteur nous annonce le début de la quête intérieure ( je considère comme acquis que quiconque lit plus de 3 lignes d’un blog appelé Graal et initiation sait que l’alchimie décrit un processus de transformation de la conscience, du psychisme et du métabolisme et non la transformation du plomb en or ou toute autre manipulation chimique plus ou moins intéressante à la Berthelot) et en décrit les effets dans le candidat.
[14] mais le procédé n’échappe pas au lecteur attentif et la liste des incohérences dans le roman du graal est longue
[15] et que l’on ne vienne pas me citer M. de Roquebert. Ce n’est pas parce que l’on est végétarien que l’on ne peut pas faire manger de la hanche de cerf au poivre à son héros
[16] comme celle de J. Bednar, cf. supra
[17] En poursuivant dans cette voie, on peut imaginer que la mansuétude de Philippe de Flandres à son égard justifie alors le prologue du conte du Graal, et notament les thèses de L’article de Wolfram von Chmielewski citée dans le précédent article sur Chrétien
[18] Dans de nombreuses gravures alchimiques (je pense ici aux gravures du XVIIème siècle) on voit dans les images représentant la phase finale de l’oeuvre, un tonneau. Soit un tonneau d’ou sort le feu, soit tenu par une main sortant du ciel (celle de dieu donc), soit marqué du signe du nouveau mercure et en train d’exploser - voir par exemple dans les gravures de MAIER, dans le LION ROUGE ou dans le SOLEIL DORE DES PHILOSOPHES.
Ce tonneau désigne à chaque fois la provenance du feu sacré des sages. Le tonneau regroupe deux notions principales : le bois de chêne (la forêt des druides) et les différentes planches qui le constitue, chacune en relation avec les autres de manière à former un récipient pouvant contenir ce feu suprême. On retrouve là cette notion de la communauté des initiés au milieu de qui se manifeste le feu