Nous revenons une fois encore aux premiers livres du Parzival de Wolfram Von Eschenbach et aux aventures de Gamuret l’Angevin. Pourquoi ? Parce que ce passage a été écrit par Wolfram en dehors de toute influence extérieure. Contrairement aux aventures de Parzival et de Gawan, Wolfram n’est pas en train d’enjoliver une source extérieure. De ce fait, il se rattache, pour faire passer son message, à un autre jeu de symboles qui révèlent son orientation profonde.
Ainsi, après son premier voyage en Orient, Gamuret revient avec une nouvelle armure et nous avons déjà mentionné le heaume de diamant :
"Il n’y avait rien au monde de si précieux que cette armure. Gamuret contempla le diamant dont était fait le heaume ; on y avait fixé une ancre, dans laquelle étaient incrustées des pierreries, toutes fort grosses. C’était là, à dire vrai, une lourde charge. Le héros était magnifiquement équipé. Quels étaient me demanderez-vous les ornements de son écu ? En son milieu était fixée une précieuse boucle d’or d’Arabie ; toute rouge, elle avait un tel poli qu’on pouvait s’y mirer. Au dessus de la boucle, on voyait une ancre de sable".
Ainsi, Gamuret a abandonné la panthère de ses ancêtres pour une ancre. Mais cette ancre est lourde de signification. En effet, elle nous relie à un symbole très courant chez les premiers chrétiens et surtout, à l’époque de Wolfram, chez les bogomiles.
Cette ancre étai en même temps associée à la vigne, à l’arbre de vie et à la croix. Dans ce symbolisme, l’ancre est un rappel de la barque de vie. Coupe et nef de font qu’un et on retrouve à nouveau, comme un résumé du processus des mystères gnostiques l’association du Graal et de l’arbre de vie.
Par l’usage de ce symbole, Wolfram se rattache au courant initiatique christique des gnostiques, des bogomiles et, à la même époque, des cathares. Et le fait que Chrétien ait lui aussi placé son roi du Graal dans une barque n’est sûrement pas une résurgence celtique [1].
[1] Même s’il n’y a pas de raison de ne pas trouver un symbole équivalant dans les mythes gallois. En effet, ces symboles ont étés utilisés depuis la plus haute antiquité pour décrire ce même processus. Les Chaldéens par exemple, parlaient d’un vase d’où s’élevait l’Arbre de Vie et on retrouve bien sûr ces symboles dans le livre des morts Egyptien